Facta Ficta

vitam impendere vero

Nietzsche thinking

[MA-621]

L’amour en tant qu’artifice

Qui veut apprendre à connaître réellement quelque chose de nouveau (que ce soit un homme, un événement, un livre), fait bien d’adopter cette nouveauté avec tout l’amour possible, de détourner promptement sa vue de ce qu’il y trouve d’hostile, de choquant, de faux, même de l’oublier: si bien qu’à l’auteur d’un livre, par exemple, on donne la plus grande avance et que d’abord, comme dans une course, on souhaite, le cœur palpitant, qu’il atteigne son but. Par ce procédé, on pénètre en effet la chose jusqu’au cœur, jusqu’à son point émouvant: et c’est ce qui s’appelle justement apprendre à connaître. Une fois là, le raisonnement fait après coup ses restrictions; cette estime trop haute, cette suspension momentanée du pendule critique, n’était qu’un artifice pour prendre à la pipée l’âme d’une chose.