[JGB-3]
Après avoir passé assez de temps à scruter les...
Après avoir passé assez de temps à scruter les philosophes, à les lire entre les lignes, je finis par me dire que la plus grande partie de la pensée consciente doit être, elle aussi, mise au nombre des activités instinctives, je n’excepte même pas la méditation philosophique. Il faut ici apprendre à juger autrement, comme on a déjà fait au sujet de l’hérédité et des « caractères acquis ». De même que l’acte de la naissance n’entre pas en ligne de compte dans l’ensemble du processus de l’hérédité: de même le fait de la « conscience » n’est pas en opposition, d’une façon décisive, avec les phénomènes instinctifs, — la plus grande partie de la pensée consciente chez un philosophe est secrètement menée par ses instincts et forcée à suivre une voie tracée. Derrière la logique elle-même et derrière l’autonomie apparente de ses mouvements, il y a des évaluations de valeurs, ou, pour m’exprimer plus clairement, des exigences physiques qui doivent servir au maintien d’un genre de vie déterminé. Affirmer, par exemple, que le déterminé a plus de valeur que l’indéterminé, l’apparence moins de valeur que la « vérité »: de pareilles évaluations, malgré leur importance régulative pour nous, ne sauraient être que des évaluations de premier plan, une façon de niaiserie, utile peut-être pour la conservation d’êtres tels que nous. En admettant, bien entendu, que ce n’est pas l’homme qui est la « mesure des choses »…