Facta Ficta

vitam impendere vero

Nietzsche thinking

[MA-227]

Conclu des conséquences au fondé et non-fondé

Tous les états et ordres de la société: les classes, le mariage, l’éducation, le droit, tout cela n’a sa force et sa durée que dans la foi qu’y ont les esprits serfs, — partant dans l’absence de raisons, au moins dans le fait qu’on écarte les questions touchant leurs raisons. C’est ce que les esprits serfs n’aiment pas à concéder, et ils sentent bien que c’est un pudendum. Le christianisme, qui était fort innocent dans ses fantaisies intellectuelles, ne remarquait rien de ce pudendum, demandait de la foi, et rien que de la foi, repoussant avec passion la demande de raisons justificatives; il attirait l’attention sur la conséquence de la foi: Vous allez dès à présent sentir l’avantage de la foi, expliquait-il, vous allez devenir heureux par elle. En fait, c’est ainsi que l’État se conduit, et tout père élève son fils de pareille façon: Tiens seulement cela pour vrai, dit-il, tu sentiras comme cela fait du bien. Mais cela signifie que de l’utilité personnelle que rapporte une opinion, on est censé tirer la preuve de sa vérité; le rapport d’une théorie passe pour garantie de sa sûreté et de sa justification intellectuelles. C’est comme si le prévenu disait devant le tribunal: Mon défenseur ne dit que la vérité, car regardez seulement ce qui suit de son discours: je serai acquitté. — Comme les esprits serfs ont leurs principes à cause de leur utilité, ils conjecturent de même à l’égard de l’esprit libre, qu’il cherche également son utilité par ses convictions et ne tient pour vrai que ce qui l’édifie. Or, comme ce qui paraît lui être utile est justement l’opposé de ce qui est utile à ses compatriotes ou confrères, ils admettent que ses principes leur sont dangereux; ils disent et sentent ceci: Il ne peut pas avoir raison, car il lious cause du dommage.