Facta Ficta

vitam impendere vero

Nietzsche thinking

[MA-244]

Dans le voisinage de la folie

La somme des sentiments, des connaissances, des expériences, par conséquent tout le faix de la culture, est devenue si grande, qu’une surexcitation des forces nerveuses et pensantes est le péril général, que même les classes cultivées des pays européens sont absolument névrosées et que presque chacune de leurs plus grandes familles s’est, dans un de ses membres, avancée tout près de l’aliénation. Il est vrai d’ailleurs qu’on va rechercher aujourd’hui la santé par tous les moyens; mais pour le principal, reste la nécessité de diminuer cette excitation du sentiment, ce fardeau de culture oppressant, qui, dût-elle même être achetée au prix de lourdes pertes, nous donne lieu cependant de former le grand espoir d’une nouvelle Renaissance. On est redevable au christianisme, aux philosophes, poètes, musiciens, d’une abondance de sentiments profondément excités: pour que ceux-ci ne nous dévorent pas, il nous faut évoquer l’esprit de la science, qui rend en général un peu plus froid et sceptique et, entre autres, refroidit le torrent enflammé de la foi en des vérités dernières définitives; c’est par le christianisme surtout qu’il est devenu si furieux.