[MA-425]
Période militante des femmes
On pourra, dans les trois ou quatre contrées civilisées de l’Europe, faire des femmes, par quelques siècles d’éducation, tout ce que l’on voudra, même des hommes, non à la vérité au sens sexuel, mais enfin dans tout autre sens. Sous une telle influence, elles auront un jour reçu toutes les vertus et les forces des hommes; il est vrai qu’il leur faudra par-dessus le marché prendre aussi leurs faiblesses et leurs vices; cela, comme j’ai dit, on peut l’obtenir. Mais comment supporterons-nous l’état de transition amené par là, lequel peut lui-même durer plus d’un siècle, durant lequel les sottises et les injustices féminines, leurs antiques attaches, prétendront encore l’emporter sur tout l’acquis, l’appris? Ce sera le temps où la colère constituera la passion proprement virile, la colère de voir tous les arts et les sciences inondés et engorgés d’un dilettantisme inouï, la philosophie mourant sous le flux d’un babil à perdre l’esprit, la politique plus fantaisiste et plus partiale que jamais, la société en pleine décomposition, parce que les gardiennes de la morale ancienne seront devenues ridicules à leurs propres yeux et se seront efforcées de se tenir à tous égards en dehors de la morale. Si les femmes en effet avaient en la morale leur plus grande puissance, à quoi devront-elles se prendre pour regagner une semblable mesure de puissance, une fois qu’elles auront délaissé la morale?