Facta Ficta

vitam impendere vero

Nietzsche thinking

[MA-463]

Illusion dans la théorie de la révolution

Il y a des rêveurs politiques et sociaux qui dépensent du feu et de l’éloquence à réclamer un bouleversement de tous les ordres, dans la croyance qu’aussitôt le plus superbe temple d’une belle humanité s’élèverait, pour ainsi dire, de lui-même. Dans ces rêves dangereux persiste un écho de la superstition de Rousseau, qui croit à une bonté de l’humaine nature merveilleuse, originelle, mais pour ainsi dire enterrée et met au compte des institutions de civilisation, dans la société, l’État, l’éducation, toute la responsabilité de cet enterrement. Malheureusement on sait par des expériences historiques que tout bouleversement de ce genre ressuscite à nouveau les énergies les plus sauvages, caractères les plus effroyables et les plus effrénés des âges reculés: que par conséquent un bouleversement peut, bien être une source de force dans une humanité devenue inerte, mais jamais ordonnateur, architecte, artiste, perfecteur de la nature humaine. — Ce n’est pas la nature de Voltaire, avec sa modération, son penchant à arranger, à purifier, à modifier, mais les folies et les demi-mensonges passionnés de Rousseau qui ont éveillé l’esprit optimiste de la Révolution, contre lequel je m’écrie: « Écrasez l’infâme ! » Par lui l’esprit de lumières et d’évolution progressive a été banni pour longtemps: — voyons — chacun à part soi, — s’il est possible de le rappeler !