Facta Ficta

vitam impendere vero

Nietzsche thinking

[MA-613]

Son de la voix des âges

Le ton sur lequel les jeunesgensparlent, louent, blâment, font des vers, déplaît aux gens plus âgés, parce qu’il est trop haut et néanmoins en même temps sourd et incertain comme le son poussé dans une salle voûtée, qui, à travers le vide, acquiert une telle force de résonance; car la plupart de ce que les jeunes gens pensent n’a pas jailli du plein de leur propre nature, mais c’est une résonance, un écho de ce que l’on pense, dit, loue, blâme dans leur voisinage. Mais les sentiments (de sympathie et d’aversion) résonnent en eux bien plus fort que les motifs qui les causent, et ainsi se produit, lorsqu’ils rendent la parole à leur sentiment, ce ton sourd d’écho qui décèle l’absence ou la pauvreté de motifs. Le ton de l’âge plus mûr est précis, bref, modérément élevé, mais, comme tout ce qui est clairement articulé, portant très loin. La vieillesse enfin apporte dans le son de voix quelque douceur et indulgence, et, pour ainsi dire, le sucre: dans bien des cas, à la vérité, elle le rend aussi plus aigre.