Facta Ficta

vitam impendere vero

Nietzsche thinking

[MA-73]

Le martyr malgré lui

Il y avait dans un parti un homme qui était trop poltron et trop lâche pour jamais contredire ses camarades: on l’employait à tout, on obtenait de lui tout, parce qu’il tremblait devant la mauvaise opinion de ses coreligionnaires plus que devant la mort: c’était une pauvre âme faible. Ils le savaient, et grâce aux dites qualités, ils firent de lui un héros et finalement même un martyr. Le lâche avait beau dire intérieurement toujours Non, il disait toujours Oui des lèvres, même encore sur l’échafaud, lorsqu’il mourut pour les idées de son parti: c’est qu’à ses côtés était un de ses vieux compagnons, qui le tyrannisait de la parole et du regard, au point qu’il souffrit véritablement la mort de la manière la plus constante, et depuis il est célébré comme un martyr et un grand caractère.