Facta Ficta

vitam impendere vero

Nietzsche thinking

[MA-447]

Utilisation de la petite malhonnêteté

La puissance de la presse consiste en ce que chaque individu qui est à son service ne se sent que très peu obligé et lié. Il dit ordinairement son opinion, mais quelquefois aussi il ne la dit pas, pour servir son parti ou la politique de son pays ou enfin soi-même. Ces petits délits de malhonnêteté ou peut-être seulement de silence malhonnête ne sont pas lourds à porter pour l’individu, mais les conséquences en sont extraordinaires, parce que ces petits délits sont commis par beaucoup de geris en même temps. Chacun d’eux se dit: « Au prix d’un si petit service, je vivrai mieux, je pourrai trouver ma subsistance; par l’absence de tels petits scrupules, je ne me rendrai pas impossible. » Comme il paraît moralement presque indifférent d’écrire ou de ne pas écrire une ligne de plus, et encore peut-être sans signature, un homme qui possède de l’argent et de l’influence peut faire de toute opinion l’opinion publique. Celui qui sait à ce propos que la plupart des hommes sont faibles dans les plus petites choses, et qui veut atteindre par eux ses propres fins, est toujours un homme dangereux.