Facta Ficta

vitam impendere vero

Nietzsche thinking

[MA-264]

L’homme d’esprit ou surfait ou déprécié

Des hommes étrangers à la science, mais bien doués, apprécient tout indice d’esprit, qu’il soit d’ailleurs sur une route vraie ou fausse; ils veulent avant tout que l’homme qui converse avec eux leur donne par son esprit un agréable entretien, les éperonne, les enflamme, les entraîne à la gravité et à la plaisanterie, et en tout cas les garde de l’ennui comme une puissante amulette. Les natures scientifiques savent au contraire que le don d’avoir de toutes mains des idées doit être réfréné de la façon la plus sévère par l’esprit de la science; ce n’est pas ce qui a du brillant, de l’apparence, de l’effet, mais c’est la vérité souvent sans apparence qui est le fruit qu’il désire faire tomber de l’arbre de la science. Il a le droit, comme Aristote, de ne pas faire de différence entre « ennuyeux et « spirituel», sondémonle conduit par les déserts aussi bien que par la végétation tropicale, afin que partout il ne tire sa joie que du réel, de l’assuré, du vrai. — De là vient, chez des érudits sans importance, un mépris et une suspicion de l’homme d’esprit en général, et en revanche des gens d’esprit ont souvent une antipathie contre la science: comme par exemple presque tous les artistes.